Le plastique : mythes, réalités et responsabilités

Évacuation des produits de combustion
Conduits d’évacuation en polypropylène (PP)
Blanc ou gris? PVC, CPVC ou un autre plastique?

Par André Massé

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Depuis la publication de la norme ULC S636, on nous interroge régulièrement sur les différents matériaux de plastique offerts pour l’évacuation des gaz de combustion et surtout sur leurs limitations. Bien que plusieurs manufacturiers, agents, distributeurs et installateurs y aillent de leurs propres interprétations, il est important de rappeler que seule la réglementation locale s’applique. Qu’en est-il vraiment?

Le code B149.1, mis en vigueur par réglementation au Québec, est la principale référence d’encadrement pour les installations d’équipements à gaz naturel et propane. Ce code fait également référence à une panoplie de normes, de codes et de manuels, tels ceux des fabricants. Toutefois, il faut se rappeler que, en cas de contradiction entre ce code et d’autres directives, le code a préséance.

Un système approuvé comme évacuation de type BH se définit ainsi selon le code B149.1 : Conduit d’évacuation conforme à la CAN/ULC-S636, constitué entièrement d’éléments fabriqués en usine conçus pour être assemblés sur place sans façonnage et destiné à assurer l’évacuation des gaz de combustion des appareils à gaz.

Code B149.1 et évacuation en plastique
L’article 8.9.6 du code B149.1-10 spécifie, entre autres, que :
Les conduits d’évacuation dont la tuyauterie est en plastique doivent être certifiés selon l’ULC S636.

À première vue, un conduit de plastique muni de la spécification ULC-S636 serait suffisant. Voyons la norme de plus près.

1) LA NORME ULC S636

Conduits d’amenée d’air et d’évacuation en PVC

a. Classe I : système d’évacuation destiné aux appareils à gaz qui produisent des gaz de combustion à des températures de plus de 135 °C (275 °F), mais pas plus que 245 °C (473 °F).

Même si cet article ne traite pas de conduits d’évacuation métalliques, il peut être utile de spécifier que cette catégorie de la norme vise particulièrement les conduits d’acier inoxydable AL29-4C. Ce type de conduit est également approuvé classe II pour couvrir les températures inférieures à 135 °C.

b. Classe II : système d’évacuation destiné aux appareils à gaz qui produisent des gaz de combustion à des températures de moins de 135 °C (275 °F).

i. Classe II a) : spécifiquement pour des températures jusqu’à 65 °C (149 °F) inclusivement.

Cette classification vise particulièrement le PVC (polychlorure de vinyle) utilisé comme conduit d’évacuation des gaz de combustion. La limite de température acceptable pour le PVC est de 140 °F, toutefois la norme ULC S636 permet aux manufacturiers d’excéder cette température puisqu’il s’agit de gaz de combustion et non de liquide tels qu’utilisés pour les tests.

ii. Classe II b) : spécifiquement pour des températures jusqu’à 90 °C (190 °F) inclusivement.

Cette classification vise particulièrement le PVC-C (polychlorure de vinyle surchloré, ou en anglais CPVC) utilisé comme conduit d’évacuation des gaz de combustion. La limite de température acceptable pour le PVCC est de 180 °F, mais la norme ULC S636 permet ici aux manufacturiers d’excéder cette température de 10 °F pour les mêmes raisons que mentionnées ci-haut.

iii. Classe II c) : spécifiquement pour des températures jusqu’à 110 °C (230 °F) inclusivement.

Cette classification vise particulièrement le PP (polypropylène) utilisé comme conduit d’évacuation des gaz de combustion. Deux fabricants seraient listés pour ce standard limité à 230 °F.

iv. Classe II d) : spécifiquement pour des températures jusqu’à 135 °C (275 °F) inclusivement.

Il ne semble pas y avoir actuellement de produit de plastique pour cette classification.


2) LES EXCLUS

L’ABS

Même si l’ABS (polystyrène-butadiène-acrylonitrile) est plus résistant à la chaleur que le PVC, il a été exclu de la norme ULC S636. La raison étant que la colle utilisée ne produit pas de fusion entre les différentes parties du système d’évacuation. Effectivement, l’utilisation de ciment-colle utilisé pour l’ABS aura pour effet de craquer après un certain temps. Donc, même si le manufacturier a inscrit dans son manuel que l’ABS était acceptable, il faut oublier ce matériau au Canada.

Le PVC et le PP dans les bâtiments classés incombustibles et ceux dits de « grande hauteur »

Parmi les conduits d’évacuation des gaz de combustion en plastique approuvés selon l’ULC S636, seul le CPVC répond aux exigences du code du bâtiment relatives aux indices de propagation de la flamme d’au plus 25 et de dégagement des fumées d’au plus 50. Le PVC Système 636 répond aux exigences de propagation de la flamme pour les constructions de type incombustible qui NE SONT PAS de grande hauteur. Lorsque les tuyaux sont utilisés dans un plafond plénum les deux indices flammes et fumée doivent être respectés, donc le CPVC s’impose. Il est donc primordial de valider selon le type de construction avant d’effectuer la sélection du matériau pour lequel il faut soumissionner. Je vous recommande de consulter l’excellent article d’Émilie Canuel-Langlois, dans l’IMB de mars 2010 (vol. 25, no 2) qui traite clairement du sujet et donne plusieurs exemples concrets, facilitant ainsi son application. On aura aussi avantage à consulter la fiche de ‘’Bonnes pratiques’’ Détermination d’un bâtiment grande hauteur encartée dans l’IMB de juin 2013.


3) LES COLLES, APPRÊTS ET COLLES DE TRANSITION

Les colles à utiliser pour une parfaite fusion des matériaux sélectionnés sont importantes. Pour la démonstration, j’ai choisi celle d’IPEX qui a la plus grande part du marché au Québec. Cependant, il faut noter que d’autres manufacturiers ont également leurs propres colles. Il est important de comprendre que l’évacuation de plastique répondant à la norme ULC S636 est approuvée comme un système d’évacuation en soi. Il est donc impossible d’utiliser des pièces ou colles provenant de manufacturiers différents dans le même système d’évacuation. Sinon l’approbation ne tient plus.


La problématique des coudes à petit rayon

Il est utile de rappeler que les coudes à petit ou court rayon sont destinés à la plomberie. Les coudes de plomberie doivent donc être exclus de tout système d’évacuation des gaz de combustion, car leur restriction est beaucoup trop importante. Plusieurs manufacturiers de générateurs d’air chaud nous confirment que les longueurs équivalentes spécifiées dans leurs manuels d’installation, qui font état de court rayon et de long rayon, référeraient plutôt au long rayon et extra long rayon d’IPEX. À titre indicatif, pour certains manufacturiers, un coude à 90° extra long rayon d’IPEX aurait 5 pi de longueur équivalente, contre 7 pi pour le coude long rayon. Pour les coudes à 45°, 2,5 pi pour les extra longs contre 3,5 pi pour les longs rayons.

Pallier l’expansion du matériau

La chaleur des produits de combustion entraîne un effet de dilatation et cause l’expansion de tout matériau d’évacuation. Il y a donc fort à parier qu’une évacuation très courte munie d’un seul coude à 90° exercerait une pression indue sur le conduit d’évacuation et risquerait de provoquer sa rupture si ce conduit est fixé à demeure dans le mur de côté. De même, un conduit relativement long qui se poursuit à la verticale au travers du toit risque, à moyen terme, de rompre l’étanchéité du scellant utilisé sur la toiture et causer des infiltrations d’eau.

Un manchon de plastique légèrement plus gros que le conduit lui-même pourrait être scellé adéquatement au mur ou au toit. Le conduit d’évacuation pourrait, dès lors, être inséré dans le manchon. L’utilisation d’un manchon utilisé sur les mats électriques qui traversent les toits ou encore une « Furnco clip » entre le plus gros conduit et le conduit d’évacuation installé à l’extérieur empêche toute infiltration. Le caoutchouc permet un certain mouvement lors de l’expansion/contraction, évitant ainsi toute pression indue sur le conduit. Cette méthode ou une autre n’est pas obligatoire; toutefois, ce genre de précaution peut éviter bien des tracas. (fig. 1)

Les spécifications des fabricants (conflits de normes)

Que penser des manuels d’installation des fabricants d’appareils qui spécifient que des matériaux tels l’ABS, le PCV, le PVCC et/ou le PP peuvent être utilisés, et ce, sans aucune restriction?
Il faut comprendre que les fabricants d’appareils font approuver les équipements selon une norme propre à chaque type d’équipement. Malheureusement, ces normes ne sont pas unifiées et peuvent, dans certains cas, ne pas refléter d’autres normes telles que l’ULC S636 en vigueur au Canada. Il faut cependant se rappeler que le code B149.1 en vigueur a préséance sur le manuel d’installation en cas de contradiction comme énoncé plus haut.

Nous ne pouvons également passer sous silence que certains manufacturiers installent un capteur ou dispositif à la sortie des gaz de combustion pour empêcher d’atteindre la limite de température dans un système d’évacuation en PVC. Pour remplir cette fonction le cas échéant, ces dispositifs interrompent l’alimentation en gaz, forçant l’arrêt du brûleur. Ce faisant, plusieurs plaintes ont été recueillies puisque l’appareil cesse de fonctionner dans les cas de grande demande.

Appareil à condensation et température des gaz de combustion

Contrairement aux appareils à efficacité standard ou intermédiaire, les appareils à condensation doivent refroidir les gaz de combustion pour y récupérer la chaleur latente, ce qui en fait des appareils à haute efficacité. Pour ce faire, ils doivent recourir à l’air, pour un générateur d’air chaud ou un aérotherme, ou au fluide caloporteur, pour une chaudière, ou simplement à l’eau dans le cas d’un chauffe-eau.

Les équipements refroidis à l’air le sont normalement à des températures ambiantes de plus ou moins 80 °F. Par le fait même, les gaz de combustion seront rapidement refroidis à des températures plus qu’acceptables pour le PVC.

Les équipements à fluide caloporteur, comme une chaudière, seront refroidis par le retour d’eau, plus froid. Des applications de plancher chauffant, de fonte de neige, de radiateurs à basse température ou de poutres climatiques seront adéquates pour le retour d’eau. Toutefois, des retours avec une température au-delà de 140 °F pourraient difficilement permettre le refroidissement des gaz de combustion et, ainsi, être inacceptables pour le PVC.

Finalement, les chauffe-eau destinés à l’eau chaude domestique utilisent, pour refroidir leurs gaz de combustion, l’eau de la ville qui y entre à des températures variant entre 35 et 70 °F selon les saisons. Évidemment, à ces températures de retour, les gaz de combustion pourraient être acceptables pour le PVC si la température de consigne avoisine les 140 °F. Toutefois, dans les applications commerciales, il n’est pas rare de voir des consignes réglées près de 180 °F. Avec un volume d’eau atteignant cette limite, les gaz de combustion dépasseront le niveau de tolérance du PVC. De plus, le cas échéant, un système de recirculation diminuera fortement la fonction de refroidissement de l’eau de l’aqueduc. Le PVC ne devrait donc pas être envisagé dans ce genre d’installation.

Des cas réels

a) Peu importe l’application d’une chaudière à gaz à condensation, les limiteurs de température installés en usine sont de 180 °F ou 200 °F. Puisqu’il est possible que la température de ce type d’appareil atteigne ces limites, il est probable que les retours d’eau ne puissent jamais refroidir les gaz de combustion à des températures acceptables pour le PVC.

b) Tests avec certains équipements

Les températures mesurées sont à titre indicatif seulement. Elles peuvent définitivement varier selon différentes conditions et marques. Celles-ci ne proviennent pas des fabricants et ne constituent pas une version officielle des données.

- Chauffe-eau résidentiel à évacuation forcée : température mesurée à 175 °F

Un manchon de caoutchouc de toiture permet l’expansion / contraction de l’évent en préservant l’étanchéité

- Chaudière à condensation : 7 °F de plus que le retour d’eau

1. 110 °F sur un système de plancher chauffant
2. 160 °F sur un système doté de radiateurs de fonte
3. 187 °F sur un système muni de radiateurs à aillettes

- Générateur d’air chaud : 135 °F

- Chauffe-eau commercial à condensation :

1. 130 °F sans recirculation
2. 185 °F en mode de recirculation et à un point de consigne de 180 °F

- Aérotherme: 106 °F

Test d’efficacité de combustion

Pourquoi ne pas utiliser la température des gaz de combustion mesurée lors du test d’efficacité de l’appareil au moment de sa mise en marche? Se référer à mon article Travailler avec votre analyseur de combustion du mois d’octobre 2006 d’IMB (vol. 21, no 2). Ce test, effectué dans des conditions adéquates, pourra définitivement vous donner de bonnes indications sur les températures et le matériau utilisé. Malheureusement, ce test ne peut se faire qu’une fois l’installation terminée.

Dépôts de tartre sur les parois de l’échangeur

Certaines conditions d’utilisation d’appareils à gaz peuvent entraîner des dépôts de tartre sur les parois de l’échangeur, dus à la précipitation des minéraux dans l’eau sous l’effet de la chaleur. Dans un pareil cas, cette condition diminuera l’effet de refroidissement des gaz de combustion, entraînant par le fait même une augmentation de leur température. Donc, malgré la rigueur de demeurer dans les paramètres acceptables du PVC, il pourrait arriver dans ces cas que les températures des gaz deviennent tout à coup inacceptables pour le PVC.

L’absence de colle peut être grave

Sans vouloir être alarmiste, il est connu qu’un incident très grave est survenu, en 2008 à Aspen au Colorado, en raison de l’absence de colle sur le système d’évacuation des gaz de combustion en PVC d’une chaudière à gaz alimentant un réseau de fonte de neige.

Comment s’y retrouver ?

La référence aux manuels d’installation, aux codes locaux et au code B149.1 en vigueur est primordiale dans toute installation. Tout installateur doit s’y référer. Par exemple, le code B149.1 exige, à l’article 8.9.5, que les 3 premiers pieds d’un conduit d’évacuation de plastique demeurent facilement accessibles aux fins d’examen visuel. L’omission de se référer aux normes et codes en vigueur pourrait donc entraîner une infraction au code, voire une négligence...

Conclusion

L’utilisation du PVC et du PVCC est malheureusement et régulièrement une question de compétitivité. N’oublions pas qu’il s’agit ici de la sécurité des gens, de la relation de confiance entre le client et votre entreprise, de la réputation de votre compagnie, de votre image et de celle de toute l’industrie. Il en va de votre responsabilité d’expert installateur. Soyons donc vigilants et… rigoureux!

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